Jardins de Pareillas

Jardins de Pareillas

art de vivre entre botanique, gastronomie et créativité


Dehors, le grand-père profite des derniers beaux jours,

Publié par nd sur 10 Novembre 2006, 17:57pm

Catégories : #musarder et zieuter

assis sur le banc de pierre, le dos contre le mur chaud de soleil, mains et genoux offerts à ses rayons.


En cet après midi de la Saint Martin, le soleil pénètre à jour frisant jusqu'au foyer où quelques braises entretiennent l'ébullition dans une cocotte revêtue d'une crasse noire et grasse, posée sur un trépied, cuisant les haricots aux couennes qui laissent échapper des odeurs aillées. Le sol pavé d'une mosaïque de petits galets aux raides figures géométriques est rude aux semelles fines, mais fait sonner les sabots. Les murs blanchis à la chaud il y a bien longtemps portent dessinés en clair sur fond de fumée, les poêles et les casseroles si noires qu'on les croirait de charbon. Au-dessus de l'évier, la fenêtre étroite, aux volets mi-clos, laisse pénétrer un rayon de soleil où jouent les mouches; comme un coup de sabre, il plonge sur la table , y fait de bronze un tas de chataignes vidées là et s'arrête sur les cendres qu'il argente. Dehors, le grand-père profite des derniers beaux jours, assis sur le banc de pierre, le dos contre le mur chaud de soleil, mains et genoux offerts à ses rayons, les hommes sont au maïs, les femmes aux bêtes, les gosses à l'école. La pièce est vide, elle est à moi, tout est silence et solitude. Silence ? Non, le tic-tac lassant de la pendule caresse, tous ces objets usuels, réunis là, me parlent des générations qui les ont patinés.

La longue et étroide table de cerisier avec tiroirs à pain aux arêtes et aux angles usés. Prés du sol, en son milieur, la barre d'appui, arrondie de tous les sabots qui s'y sont reposés; contre elle, les deux bancs luisants de tous les cotillons et fonds de culottes qui  les ont astiqués, quelques chaises paillées et de bois tourné, alignées contre le mur, encadrent la maie décorée de dessins linéaires, grossièrement taillées au couteau.

Le buffet cache, derrière ses lourdes pointes de diamants, le service à fleurs des grands jours, les verres à pied, quelque peu de vaisselle fantaisie achetée aux foires ou gagnée en prime, des "gadgets" si pratique dans les doigts habiles des vendeurs mais qu'il est bien difficile d'utiliser rendus à la maison. Au dessus, le vaisselier expose, retenus par des barres de bois, assiettes et plats d'étain égayés de pots en faïence aux dessins naïfs, aux formes inusitées; des récipients de cuivre font taches d'or.

Face à la maie, le bahut bas aux pieds tournés reçoit le linge de la table, les torchons, les tabliers. Sur l'étagère du bas, emplilés : livres de comptes, prospectus d'engrais, réclames diverses, catalogues, "Almanach Vermot", quelques numéros de la "Veillée des chaumières", du "<petit écho de la mode". Une pile de journaux vieux et récents. Le livre de messe de la grand mère. Aprés tout, c'était bien aussi intéressant que "Match" ou ces romans policiers qui font peur. En tout cas les couvertures n'en sont pas aussi scandaleuses ! Sur le haut bahut, sous globe un vase blanc et or avec ses fleurs en papier bien tristes d'avoir vieilli enfermées. Un obus de 75 désamorcé. Une vierge de Rocamadour à la face noire, les yeux au ciel. Touchants bibelot-souvenirs.

La haute pendule à balancier droite et sobre agresse le plafond de son fronton arrondi ...
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